Fumée passive

La liberté des autres

« La liberté est le pouvoir qui appartient à l’homme de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d’autrui : elle a pour principe, la nature ; pour règle, la justice ; pour sauve-garde, la loi ; sa limite morale est dans cette maxime : ne fais pas à un autre ce que tu ne veux pas qu’il te soit fait. ». L’article VI de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1793 n’a pas pris une ride. Il reflète la conception libérale de la Liberté.

De cette liberté, il en est beaucoup question ces temps, au sujet de la loi valaisanne sur la santé, soumise au peuple, le 30 novembre prochain. On le sait, cinq articles de cette loi font débat, soit ceux qui interdisent la fumée dans les lieux publics, au nom de la protection contre la fumée passive. Certains de mes amis s’en émeuvent et s’activent contre cette loi « liberticide » à leurs yeux. Les grands principes sont réquisitionnés pour les besoins de la cause. S’opposer à l’interdiction de fumer dans les lieux publics constituerait un devoir pour tous les esprits libéraux. Les référendaires, portés sans doute par l’enthousiasme, sont mêmes allés jusqu’à écrire de belles perles dans la partie, qui leur est réservée, de la notice explicative envoyée à tous les citoyens. Je cite : « … l’article proposé est parfaitement superflu (les prescriptions fédérales sur l’hygiène au travail suffiraient). Si cependant une interdiction totale de fumer dans les établissements publics est prônée, il faudra aussi interdire les chandelles et cheminées ouvertes dans ces établissements. En suivant cette logique froide il faudra finalement interdire les chandelles et les encensoirs dans toutes les chapelles et les églises. ». J’ai dû me frotter les yeux en lisant cette prose. Non, ce n’est pas vrai, les référendaires n’utilisent pas ce genre d’arguments. Il doit s’agir d’une erreur. Ce n’est pas possible. Et bien non ! C’est écrit, noir sur blanc. Je laisse à chacun le soin de le vérifier en consultant l’avis officiel, aux pages 5 et 6 !

Je ne vois pas en quoi la liberté du fumeur devrait obligatoirement l’emporter sur la liberté du non fumeur, et surtout sur celle du serveur ou de la serveuse, exposés involontairement aux effets nocifs, avérés, de la fumée passive. « La liberté est le pouvoir … de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d’autrui. ». On ne saurait mieux dire. Et que l’on ne vienne pas me rétorquer que les auteurs de la célèbre Déclaration n’étaient pas des … libéraux !

Léonard Bender